Joëlle de La Casinière
Peut-être juste un petit mot d’explication sur le projet: On a commencé il y a trois ans avec un grand projet de recherche autour des années ‘70 pour raconter l’histoire de l’art de cette période d’experimentation de film et vidéo en Belgique. Je commence toujours par demander: comment êtes-vous entrer en contact pour la première fois avec le film et après la vidéo? Quelle était votre première expérience?
Pour moi c’est très particulier, parce que le film est lié à l’Amérique du Sud. J’ai rencontré ici à Bruxelles un garçon péruvien, qui finissait l’INSAS, l’école de cinéma. Il finissait en ‘70 et voulait repartir chez lui au Pérou pour faire son métier de ‘filmmaker’ au Pérou, à Lima. Ici à Bruxelles, nous étions dans une collectif d’artiste. Nous avions une maison où beaucoup de gens passaient et ce garçon est passé parmi d’autre et est devenu très ami avec nous et les artistes qui y habitaient. J’ai décidé d’aller avec lui, commencer à faire des films au Pérou. Je n’avais jamais fait de cinéma, j’étais peintre, mais ça m’intéressait beaucoup d’entrer dans cette connaissance, donc nous sommes partis, pas ensemble. Lui est parti premier, je l’ai suivi assez vite, en juillet 1970. Lui était surtout un très bon, très intéréssant artiste-photographe, et donc son vrai métier était la direction photo. On était très jeune tous les deux et lui ça allait être ces premières expériences professionnelles. On est arrivé là-bas en 1970. Le Pérou était encore très pauvre et loin de la modernité, mais il y avait quand même un bon gouvernement qui était un gouvernement un peu bizarre. C’était des militaires socialistes, comme le Nasser en Egypte. Mon ami évidemment était de gauche, militant et très enclin à s’occuper des peuples, de leur bien-être et de leur bonheur. Donc il est allé parler avec des gens du gouvernement. Ca nous a pris quelques mois. On vivait dans une maison qu’on nous avait prêté qui était en ruine, sans chauffage l’hiver, c’était assez dur. Mais il a enfin eu le premier contrat dans lequel j’étais impliquée et c’est là que j’ai connu ce que c’était que de faire du cinéma. C’était un contrat pour le ministère de l’agriculture, pour faire des films dans les montagnes, dans les communautés amérindiennes des Andes. Faire des films qui expliquent qu’est-ce que pourrait être la reforme agraire, parce que c’était le premier intérêt de ces gens socialistes au gouvernement. Dans les pays d’Amérique du Sud, les grandes propriétés gigantesque apparternaient à des gens très riches et puis tous les petits paysants étaient en grande difficulté comme au Moyen-Age en Europe. On nous avait donné des thèmes à évoquer, un véritable cahier de charge sur ce qu’il voulait. On est donc parti avec une petite voiture et on est allé dans des communautés, c’était absolument extraordinaire. Alors lui, évidemment filmait. A l’époque il n’y avait pas de son synchrone. Moi je faisais le son avec des claps qu’on post-synchronisait ensuite. Mon ami Carlos Ferrand faisait la caméra. Ferrand, c’est un nom français, il avait un mélange de français dans sa famille péruvienne. Il vit toujours et est très célèbre. Il vit à Montréal, au Canada. On s’est donc mis à faire ce travail très intéressant.
Mon approche du cinéma, c’était donc le son qui m’intéressait beaucoup. La prise de son et aussi après, le montage était une grande partie de mon activité du cinéma. Le montage, pur et simple, le montage. J’ai appris sur le tas, sur le terrain, avec ce garçon qui sortait de cinq ans d’études et qui était quand-même déjà assez capable et qui m’apprennait un peu les choses. Là, on a fait toute une série de court- et moyen-métrage, très intéressant. Evidemment il ne reste pas de traces, parce que à notre âge, on ne voulait pas garder des copies ou des choses de travail qu’on faisait, donc c’est peut-être encore au
ministère de l’agriculture de Lima, je ne sais pas, c’est possible. Mais moi j’ai appris beaucoup et on a fait un film qui reste encore dans votre collection, qui était à la fin de notre programme de commande. On a fait un film ensemble qui s’appelle Cargadores qui est
chez vous et qui est sur les porteurs de la ville de Cuzco, et qui était notre première oeuvre personnelle, après tout ces travaux, d’apprentissage pour moi et de commandes pour Carlos. Voilà, ça c’était le début du cinéma. Alors après j’ai monté les films qui étaient commandés, j’ai aussi monté Cargadores. La commande était fini, je suis partie, j’ai continué mon voyage, car c’était devenu un voyage et je suis partie en Colombie. Là, j’ai rencontré un ami avec qui on a fait du théatre et l’expérience de théatre a fini par un film: un autre film qui est aussi chez vous, Henri IV. Ca c’était fin ‘71 - ‘72, quelque chose comme ça. Tout ça c’est du 16 mm, péllicule. Et pour faire ce film, après des mois et des mois, en tout je suis restée 16 mois, donc c’était une longue expérience. Ca c’était la fin de l’expérience, ce film là. Et pour tourner Henri IV, Carlos est venu de Lima et un autre ami, qui était un de nos ami artiste de Bruxelles est venu aussi pour collaborer un peu, parce qu’on avait pas beaucoup de temps, pas beaucoup de moyens, donc mon ami de Bruxelles a apporté de la péllicule. Enfin, tout ça était une espèce de petite action collective. On était quatres ou cinq à ce retrouver là de l’équipe de Bruxelles pour peu de temps, trois semaines - un mois, pour faire ce film Henri IV. Ensuite je suis rentrée à Bruxelles deux-trois mois après. Je suis rentrée, Carlos lui est resté au Pérou, il voulait faire sa vie et son métier dans son pays, pour lui c’était une militance de choses
importantes. Il est donc resté là, moi je suis rentrée à Bruxelles, j’ai monté le film Henri IV à Bruxelles. Le film Cargadores, il est allé très vite à un festival de court-métrage à Waterloo, je crois.
Oui, c’était l’une de mes questions aussi. Où est-ce que les films pendant les années ‘70 sont montrés? Quels étaient les endroits?
C’était des festivals underground. Il y avait beaucoup d’associations, mais qui étaient des choses petites et qui s’occupaient de diffuser des films comme ça d’indépendant. On était complètement indépendant. Moi j’ai tout fait en indépendant, sauf après, avec la vidéo, ça s’est un petit peu officialisé, mais les films on les a fait complètement indépendant avec très peu d’argent à nous et des aides, parce que la suite, c’est que donc il y a ces deux films, dont un est très court, le Cargadores est très court, l’autre est plus long. L’autre je l’ai monté à la maison, chez moi, sur une petite moviola, juste l’image, d’abord. Il n’y a pas de son synchrone. Et ensuite j’ai fait une bande sonore avec des musiques, des lectures, ma voix off qui lit un texte qui est dans le film etc. et puis j’ai fait surtout un livre qui va avec le film et qui est ici aussi je crois. Absolument nécéssaire.
Oui, la relation entre les films et les livres m’intéresse.
J’ai fait très souvent des livres en même temps que les films, ou à côté ou après. Soit après, ce sont des espèces de livre (Libreto), soit avant et ce sont des scénari. Il y a tout un jeu comme ça. Et donc là celui-là, Henri IV, est complètement associé au livre absolument nécéssaire, dans la mesure où le film était comme la mise-en-image d’un texte. Et donc je les ai fait absolument en même temps, le livre et le film, simultanément à Bruxelles. Dans le film, il y a une partie du texte du livre et dans le livre il y a un texte qui s’appelle texte-film. Donc ils sont complètement mélangés, bien qu’ils parlent de choses différentes en grande partie, il y a des points communs, mais c’est quand même très divergeant. C’est plutôt un complément, une oeuvre qui est double et qui se complémente. Deux médias qui se chevauchent.
Après ce film, ça va aller assez vite. Je suis repartie en Amérique du Sud pour faire une autre série de films. Et donc deux ans après, en ‘73, je suis repartie pour rejoindre Carlos, parce qu’on pensait bien qu’on allait filmé avec lui, qu’il allait être notre filmmaker - caméra, mais aussi avec un de mes ami artiste qui vivait dans la maison à Bruxelles et qui s’est intéressé au projet et avec qui on a écrit différents films qu’on a tourné là-bas. Donc on est reparti en ‘73 et on est resté à nouveau plus d’un an et là on a tourné tous les autres films 16 mm qui sont dans la collections, toute la petite série. Ca doit être sept ou huit films, peut-être. Je crois qu’en tout, il y a dix films 16mm, fait au début des années ‘70. Ils sont vraiment dans le sujet. On est arrivé au Pérou, là c’était un autre projet différent. On est allé en avion de Bruxelles à Montréal, et de Montréal on a pris une voiture et on a traversé tout l’Amérique du Nord et tout l’Amérique du Sud, avec notre matériel et cette voiture. Et on est allé jusqu’à Lima où Carlos était là, et on avait l’intension de travailler avec lui. Donc de commencer par faire des films au Pérou et puis après, on ne savait pas encore trop. Sans projet, avec un producteur qui nous a laché très vite, douloureusement, on s’est retrouvé tout seul. On est resté à Lima un certain nombre de mois pour envisager ce qu’on allait faire, ce qu’on allait filmer. De toute façon, on voulait faire des documentaires ni commerciaux, ni pour la télévision. On voulait faire des moyen-métrage, en général, sauf si on avait une idée pour une choses très courte, on le faisait. Mais des moyen-métrage, c’était l’idée de base. Des moyen-métrage en toute liberté, puiqu’on avait plus de producteur, on avait personne pour nous commander. On voulait inventer pour chaque films quelque chose qui nous plaisait et qu’on pensait bel et honnête à réaliser. Donc on a un peu tremper dans le pays, dans la ville de Lima surtout, les alentours, on a voyager un peu, parce que moi j’étais de culture hispanic, je savais l’espagnol, mais pas mon ami qui m’a accompagné, donc il fallait un peu se mélanger au pays et comprendre un peu. Puis, on a eu assez vite l’idée grâce à Carlos, qui lui était chez lui depuis maintenant deux-trois ans, une suggestion intéressante qui a donné Rose de Lima, qui est se film dans une ville du désert froid du Péru. Le désert qui longe le Pacifique, qui est un désert de sable, tout du long du pays, froid et humide, c’est très particulier. Dans la banlieu de Lima, on nous a parlé d’un squat très important, qui s’était créé trois ans avant. Quand on a filmé, il y avait une fête du troisième anniversaire du squat, qui est devenu une cité occupé par la population. Ce sont des gens qui sont arrivés en une nuit. C’était toujours le gouvernement socialiste péruvien, on était donc pas sous la dictature habituelle, donc il y avait des possibilités pour les gens d’inventer des choses. Il y a eu un mot d’ordre et en une nuit, des populations importantes, du genre un milliers de personnes, peut-être un peu plus, sont arrivés avec des materiaux en paille, bois, des choses très simple. L’idée c’était que, si on pouvait créer une maison dans ce désert inoccupé, qui n’appartenait à personne, à l’état, c’était à vous. Si vous construisez une maison là, on ne pouvait pas vous chasser. Ces gens ont fait toute cette action en même temps et Carlos avait appris ça, parce qu’il avait un frère très militant. Il savait que ça allait se passer. Il était là quand les gens sont arrivés, il a fait des photos et donc il nous a montré les photos, on est allé visiter l’endroit/ la ville nouvelle qui commençait à prendre un petit peu forme. C’était presque uniquement des maison en paille, en carton. Les gens commençaient un peu à faire des choses en béton, mais très peu, c’était encore très jeune. Entièrement autogéré et très bien organisé, un lieu formidable où on a tout de suite compris qu’il fallait filmé ça. Et alors on est arrivé là avec ce projet et on a vu des dirigeant du lieu et tout ça. Ils nous ont dit qu’il y avait quelqu’un qui était venu filmer ici l’année dernière. C’était Venderkuiken. Il a fait un film là, un an avant nous, Ice Age, je crois. C’est un film où le lieu, Via Salvador, est un des sujets, mais c’est un film avec plusieurs thèmes qui s’entrecroisent. Je l’ai vu il y a pas longtemps, je ne le connaissais pas quand on est allé là-bas bien sûr. J’ai pas réussi à le voir avant, et puis là un jour il est arrivé à moi. C’est pas très intéressant, le notre est meilleur (rigole). On a tourné avec Carlos, avec des péllicules de toutes sortes qu’on avait accumulé et ça été merveilleux, mais c’était pas comme la fois précédente où un mois après j’étais repartie avec le film. Là, on envoyait le film à un labo ici en Europe et on savait pas du tout ce qu’il y avait sur la péllicule, donc c’était un peu angoissant. C’était ça le monde de la péllicule argentique, il fallait attendre. Petit à petit, tous les films qu’on a fait ont été envoyé au même labo à Londres, chez Rank Xenox, je ne sais pas pourquoi. Je crois qu’il y avait un contrat à l’origine avec le producteur qui nous a abandonné et donc ça facilitait les choses, parce qu’on envoyait les boites du Pérou. A l’époque c’était quand même assez impressionnant comme voyage. On a envoyé les bobines et puis on a fait un film dans les Andes qui s’appelle Le petit touriste.
Oui je connais aussi.
Ce film était presque une fiction, contrairement aux autres. Il y a une petite histoire très éliptique et puis ça se passe beaucoup dans le train, ce n’était pas très facile. On avait une deuxième caméra d’un ami nord-américain, que j’avais connu en Colombie lors du premier voyage et avec qui on a fait ensuite un petit film qui s’appelle So Happy à New York. Et il nous avait dit, “Si vous retournez filmer là bas, j’aimerais beaucoup participer’. C’était tout des trucs d’ami, il n’y avait pas d’argent, personne n’était payé. C’était des choses complètement de l’époque, ce qu’on appelle le cinéma parallèle, le cinéma underground qui est une chose complètement disparue aujourd’hui.
Je me demandais aussi où vous aviez obtenu des choses comme les caméras?
L’Américain lui était filmmaker, il avait son matériel, du beau matériel: l’éclair et un nagra magnifique. L’éclair et le nagra pouvaient faire du 150, mais avec cable, c’était la première fois qu’on faisait du 150, parce qu’avant sur le Henri IV etc, on avait pas tout ce matrériel. Moi j’avais un uher qui ne pouvait pas être raccordé. Puis surtout, c’était la caméra qui pouvait pas être raccordé. On aurait pu raccordé le uher sur une éclair, mais on avait une arriflex de campagne, de militaire quasiment. C’est une caméra qui a servie beaucoup dans l’armée. Très solide, mais très simple, rustique avec pas beaucoup d’objectif.
La première fois c’est avec le matériel de Carlos qu’on a travaillé. Le matériel n’était sûrement pas à lui, parce qu’il n’avait pas encore d’argent, mais il avait ça sans doute du ministère pour notre travail à nous. Quand on est parti pour le ministère de l’agriculture, on nous a équipé. On était payé peu, mais on avait du matériel qu’ils avaient au ministère. Ils avaient des services de filmage, forcément. On avait donc eu du matériel là. Après pour faire Henri IV on était complètement misérable. C’est Carlos qui est venu avec une caméra, sans magnétophone. Moi j’en avais un, parce que je m’étais passionnée pour le son, donc j’avais un petit magnétophone, un somni-cassette. C’était pas encore le baladeur comme on l’appelait, mais c’était une petite chose à cassette de bonne qualité pour faire des cassettes correctes et un bon micro aussi. Après, pour Rose de Lima, on avait notre matériel, qu’on avait apporté avec la voiture d’Europe. On l’a trimbalé dans la voiture après à travers les Etats-Unis en craignant autant les voleurs que les douanier. En tout cas, on est passé comme ça à travers tout comme des inconscients débiles. Il nous est jamais rien arrivé.
Après on a petit à petit tout volé, mais tant qu’on était un petit groupe et dans la voiture, ça passait. Et donc l’autre caméra qui a fait en partie Le petit touriste était de notre ami américain Bruce Williams, il vit toujours et c’est toujours mon ami. Bruce est venu avec son magnifique matériel et il sortait aussi des études, il était très jeune. La péllicule, c’était nous qui la trimbalions dans la voiture depuis l’Europe. Donc Bruce et Carlos ont été les caméras alternées. Soit parce que l’un était libre et pas l’autre, à ce moment là on faisait quelque chose avec l’un ou avec l’autre et ça s’est très bien passé. Ca c’était le Pérou, et ensuite on est parti, toujours avec notre voiture, Carlos est resté chez lui. On est parti en Colombie continuer d’autres projets de film. Je m’étais familiarisé avec deux pays principalement, le Pérou et la Colombie. On a refait ça plus tard, ça simplifiait beaucoup les choses, parce que j’avais déjà vu des choses intéressantes que j’avais suggérer pour des scénarios etc. On est donc reparti en voiture avec notre ami et Bruce en Colombie pour faire l’autre projet qui est Les Indes Galantes. Ce projet s’est fait entièrement en Colombie, dans deux lieux: un immense parc national où tout est protégé et qui a servi à faire les tableaux de l’opéra et puis ensuite sur la côte nord, qui était aussi un endroit où j’avais vécu que je trouvais très intéressant. On a fait des choses dans des villes, des personnages dans des villes. L’idée de base c’était cette opéra de Ramaud qui était une histoire en plusieurs volets qui parle de l’établissement des Espagnols dans les Indes occidentales. On aimait beaucoup cette musique qui était pendant très longtemps ignoré, oublié en France et qui commençait à ressortir, à être jouer et qui nous avait frappé. On s’est dit, on va mélanger ça avec le son de ce trip style Américain. C’est un film assez curieux, mais qui est bon. J’ai bien aimé faire ça. Ca c’était dans le nord de Colombie et puis il y a des parties qui ont été faites sur le voyage de retour au Costa Rica. La fin du tournage a été fait au Costa Rica, dans la ville de San José. A part ça, il y a d’autres petits films qui ont été fait qui sont des choses courtes. Il y a Satz.
Il y a aussi un Super 8 j’ai vu?
L’histoire du Super 8 a été gonflé en 16. Les films qu’on a fait comme ça, c’était des films noir et blanc où il nous intéressait d’avoir le grain de l’image et donc l’histoire de le passer en 16mm était un projet esthétique qui allait avec le film. Il y a Suite qui est fait comme ça.
Et il y a aussi un film télécolor inflammable?
Oui, ça c’est après à Montréal. De là on est parti avec le programme de film tout à fait indépendant, on envoyait toujours la péllicule en Angleterre, on arrivait à 6 ou 7 films dont on savait rien. On avait jamais eu d’idée de la bonne exposition, du bon focus, ou quoi que ce soit. Et on est rentré séparément. Mon ami qui s’appelle Michel Bonnemaison, lui, a pris Carlo dans sa voiture. C’est pour ça qu’ils ont su filmer encore un peu au Costa Rica, parce qu’ils étaient ensemble. Carlos avait son matériel. Ils ont fait du covoiturage. Carlos voulait aller à Los Angeles pour son travail et Michel était content de passer par la Californie, parce qu’il avait une amie là qu’il voulait voir. Mais le but pour Michel était de retourner à Montréal toujours avec la voiture et Carlos allait resté à Los Angeles. Et donc ils ont tourné encore un peu au Costa Rica, la fin du film Indes Galantes et ont pris la route vers la Californie. Ensuite Michel a traversé en partie les Etats-Unis. Ca commençait a être l’hiver, le temps était devenu tellement mauvais qu’il a laissé sa voiture quelque part avec tout le matériel et est parti passer Noël avec sa fille qui elle était une écolière qui commençait à être adolescente (14 - 15 ans). Elle l’attendait à Boston au collège pour passer Noël ensemble, et ensuite aller avec lui à Montréal. Le but c’était Montréal, et moi aussi j’allais les retrouver à Montréal pour monter les films.
Tout ça était une grande aventure qui finissait pas si mal en fait. Pour te passer des détails et rester dans le sujet film, on s’est retrouvé finalement à Montréal et j’ai dû aller m’occuper de sortir les films ‘processed’/ développé, avec des copies de travail, comme le contrat l’avait demandé à Londres. Donc j’ai laissé Michel et sa fille au Canada, je suis partie à Londres où les films étaient carrément séquestrer par la Rank Xerox parce que le producteur prétendait qu’on lui devait de l’argent. Le contrat était fait entre nous, le producteur, la Rank et le laboratoir. Le laboratoire ne voulait nous rendre les films parce que le producteur ne voulait plus payer. Donc je suis partie à Londres pour essayer d’arranger l’histoire. Ca m’a pris plusieurs mois, je suis arrivé en octobre et ça m’a pris jusque pratiquement en avril pour arriver à debrouiller toute l’histoire et à trouver l’argent pour payer le labo. Heureusement, je n’ai pas perdu mon temps, je me suis retrouvée chez des squatteurs, les squatteurs de Londres, la squatscene de Londres, où j’ai rencontré des gens absolument extraordinaire. J’ai vécu des mois absolument magnifique, tout en m’occupant de négocier la libération des films pris en otage. Je suis retourné à Montréal avec les films, sans rien avoir vu, et là il a fallu s’occuper du montage. On a eu beaucoup de chances, un miracle après l’autre, pour la fabrication de ces films, parce que pendant que j’étais à Londres, mon ami Michel était devenu ami avec un cinéaste français qui habitait à Montréal depuis longtemps et qui voulait partir en France. Il était ruiner, il vivait avec sa carte de crédit et voulait partir du Canada, parce qu’il avait beaucoup de dettes. Il avait un appartement, où il avait une moviola 16 mm professionelle, fabuleuse. A part ça, il avait une vieille BMW qu’il laissait là aussi. Michel négociait avec lui, il lui a payé tous les billets d’avion pour sa famille, pour qu’il puisse partir rentrer en France, contre la Moviola, la reprise de l’appartement en location et la BMW. C’était absolument génial, parce qu’on avait la machine chez nous, pour monter les films. C’était le vrai miracle, parce qu’on a commencé à visioné. Bruce, l’ami qui avait tourné en partie, était un grand monteur. En fait, il était meilleur monteur que filmmaker-caméra. Son truc c’était le montage et c’est lui qui a monté So Happy, on voit son style. J’ai beaucoup appris avec lui aussi en montage. Ce garçon, qui habitait dans le Maine, quand on lui a expliqué la situation, il est arrivé et on s’est mis à travailler sur les films ensemble. Les films, c’était du très beau shooting, tout était bon, il n’y avait rien à y rajouter.
Tout était impecable, mais c’était des choses très disparate. C’était un tournage improvisé, très libre. Il y avait une trame, un propos de base, mais après le montage faisait le film. C’était avec le montage, qu’on faisait le film. Aussi avec le son et le montage du son. C’était donc très important d’être trois, parce que Michel était un peu le réalisateur. Moi et Bruce, nous étions très intéressés au montage. Donc à nous trois on a fait que ces films existent vraiment. Les rushes étaient très jolis, mais si quelqu’un d’autre avait pris ça en main, il aurait fait autre chose. C’était devenu très personnel parce qu’on a fait tout ensemble, jusqu’au bout. Une autre chose merveilleuse c’est qu’on avait tout le temps, on a passé un an à monter ces films et en même temps on a connu des gens à l’office national du film (ONF) de Montréal, comparable à l’INA (Institut Nationale du Film) en France. Ils aidaient les gens qui n’avaient les moyens de finir un film, les choses comme ça. Ils nous ont offert toutes la post-production de nos films. On a fait tous les montages chez nous, à nos frais et ensuite on a eu la post-production avec de très grands technicien pour les mixages, les montages negatifs, c’était une chance formidable. Voilà l’histoire des dix films 16 mm du Montfaucon Research Center.
Je me demandais, le Montfaucon était à Bruxelles?
Oui, c’était une association homologuer à Bruxelles, j’ai encore les statuts dans mes archives. Une associations d’artistes.
Et est-ce que là vous aviez aussi des moyen de production ou pas vraiment?
Pas grand chose. En plus, le Montfaucon Research Center a fait tous ces films un moment donné, mais on était des peintres, poètes, des dessinateurs, des graphistes, donc on avait très peu de moyen, mais notre travail ne coûtait pas grand chose non plus. On vivait comme ça.
On a fait l’association parce qu’’on faisait des livres qu’on voulait éditer. Alors on pensait que c’était bien d’avoir une association, pour devenir des espèces d’éditeurs, comme toujours, underground, libertaire, compètement sauvage et typique de l’époque post ‘68. Ca commençait à Bruxelles en ‘69. Il y avait un ami peintre portugais qui était réfugié politique, un autre, Manuel Bellofor, aussi réfugié politique du Portugal, des gens comme ça. Aussi des étudiants que étaient à La Cambre. Il y avait une Italienne qui étudiait à La Cambre. J’ai connu presque tout le monde à La Cambre. J’ai fait un temps à La Cambre, pas très longtemps. Un an ou deux. La plupart des gens qui ont vécu ensuite dans cette maison collective, c’était des gens de La Cambre.
Et fin des années ‘70, il y avait aussi des cours de vidéo à La Cambre, je crois?
Non, on a pas du tout fait ça. Je faisais de la peinture monumentale à La Cambre. C’est là que j’ai connu Alberto, qui faisait aussi de la peinture monumentale chez le professeur Delahaut. Et puis Olimpia Hruska et Annie Masquilier étaient en publicité. Il y en avait d’autre encore, comme Jean-Lou Christophe et Marc Octave, un artiste belge très important, bien qu’il soit méconnu. Grand artiste belge. C’est un grand artiste qui est mort prématurément. Tous ces gens étaient ou à La Cambre, ou gravitant autour de La Cambre. Notre maison collective était très près de La Cambre, donc c’est devenu un espèce d’endroit prendant pas longtemps, cinq ans, où beaucoup de gens sont passés. Des gens en voyage. C’était un lieu formidable.
Si on avait des aides? Non, on avait une aide absolue et essentielle dans notre collective, c’était Michel Bonnemaison qui lui avait des moyen d’existence et il recevait tout le monde. Il louait une maison de maître avec tous les étages. Et donc on était presque tous les jours quinze à table et les gens qui voulaient dormir là, dormaient là.
Vous avez encore des archives ou photos de la maison?
Oui, il y a surtout un film qui est ici, qui s’appelle ‘Dans la maison de Montfaucon Research Center’ et qui montre toute la maison, mais avec les personnages en photo polaroid. Les personnages sont en polaroid, la maison est en noir et blanc, vide. Ca c’est une archive. J’ai fait le films il y a pas longtemps, trois - quatres ans, justement parce que j’avais ces archives et je voulais que ça fasse quelque chose, parce que c’était juste des rushes dans une boite. Sinon il y a les livres qu’on a voulu édité. On voulait être une maison d’édition, c’est pour ça qu’on avait l’assocation. Evidemment, on n’a jamais pu réussir un seul livre, mais on a quand même fait ces impressions et ces livres qui sont importants aujourd’hui encore. Et beaucoup de photos.
Est-ce les livres sont aussi présenter avec des films parfois? Ou c’est jamais présenter ensemble?
Non, c’est deux mondes différents. Maintenant, j’ai reussi une nouvelle chose grâce à l’informatique et qui m’intéresse beaucoup, c’est que dans certain livres qui parlent de vidéo - un certain nombre de vidéos associées à des livres - je met la bande-son sur un usb-coin, c’est une petit chose toute plate, comme une pièce de deux euros. Quand tu ouvres, c’est une clé usb et tu peux mettre autant que tu veux. On a pris 2gb, c’est pour mettre seulement du son. Et maintenant, j’ai un certain nombre de livre dans lequel je mets l’usb-coin avec le son de la video dans le livre. C’est une fabrique hollandaise qui fait ça. Tu envoies une chose à imprimer sur le petit coin en plastique et alors j’ai fait imprimer ‘Montfaucon Research Center archive audio’ sur l’extérieur. Donc on écoute en regardant le livre. Le son est très important pour toutes nos oeuvres. D’abord parce qu’il y a un musicien attitré au Montfaucon Research Center qui a depuis toujours fait toutes les musiques et les bandes son, Jacques Lederlin. Grâce à lui, puis à mon goût pour le son et le montage sonore. Quelques fois, ça m’intéresse même plus que la vidéo. Je pense que nos vidéos sont si pauvrent pour la plupart, jusqu’à une certaine époque, que c’est presque des maquettes. Pour moi ça a toujours été des espèces de maquettes. On aurait dû avoir les moyens de refaire en grand et notamment quand le numérique est arrivé, refaire en numérique. Donc le livre et le son sont des choses presque plus aboutit, plus professionnelles que les vidéos. Je suis donc très contente de cette association grâce au numérique. Dans le livre en papier, le son numérique est très intéressant. On a beaucoup parlé des films, si tu veux on peut faire une autre séance avec la vidéo. Parce que la vidéo c’est tout à fait autre chose. C’est très précis, parce que c’est localisé aussi. Notre première vidéo date de ‘78, juste à la fin quand on a fini les films et en ‘89 j’ai arrêté. Maintenant je fais des choses à moi, personnelles. Les dernières années, c’est des choses plus d’archives que j’ai fait, parce que j’arrivais à un moment où il fallait sauvegardé des choses qui allaient resté inachevé ou perdu. Toute notre période de découvert et création de vidéo: on a commencé en deux pouces et on fini en numérique en ‘89. Donc c’est un autre trip, c’est différent.
DEEL 2: Video
J’ai vu pour la première fois de ma vie un portapack-vidéo mobile noir et blanc avec un magnétoscope et une caméra d’une amie d’amis qui est venu chez nous dans la maison d’artiste Montfaucon, rue de l’aurore à Ixelles. Elle est arrivée avec ça et on a passé toute la soirée à regarder des bandes qu’elle avait fait en Amérique sur une petite télé, noir et blanc. C’était la première fois que je voyais de la vidéo et mes amis aussi, c’était en ‘73. Ensuite, la première vidéo que j’ai faite en collaboration avec mes deux-trois amis habituels, c’était en ‘77-’78. C’était une commande du Centre Pompidou et de l’INA, qui a donné les sous et les aides, et qui était co-producteur. Puis c’était le Montfaucon qui assurait la production délégué. Là, on a fait une oeuvre qui s’appelle le plein du vide, une oeuvre purement artistique. C’est notre première vidéo, ça a été fait en deux pouce. Très professionnel, grâce au gens à l’INA, trop professionnel presque, avec du matériel de télévision pour des gens qui ne connaissaient pas du tout le médium. On l’a traité à notre manière, d’une façon très improvisée, très poètique. Tout ça, c’était avec Michel Bonnemaison et Carlos qui est venu faire la caméra. Le Centre Pompidou venait d’être construit et inauguré en ‘77, je crois. La commande était peut-être moins d’un an après et ils voulaient qu’on fasse une oeuvre avec le Centre Pompidou, le batiment au coeur du sujet de la vidéo. A part ça, on avait carte blanche, on a fait notre propre histoire. Là, ce qui nous intéressait beaucoup, c’était ce nouveau médium et comment on faisait avec médium une oeuvre d’art. Ca a été une chose où à nouveau j’ai fait le montage, toute la réalisation était pratiquement prise en charge par Bonnemaison, Carlos a fait la caméra. Il était au Canada, il est venu du Canada pour tourner. Moi, j’ai fait le montage et le son, comme j’avais commencé cette activité qui m’intéressait particulièrement. J’ai fait la prise de son, ensuite le montage son et le montage image avec un autre ami qui s’appelle Enrique Ahriman, qui a beaucoup travaillé avec nous, notamment en vidéo. C’était un très grand souvenir pour nous, parce qu’on a eu de très bons moyens pour travailler et on a fait une oeuvre qu’on a aimé exprimer et en plus il y a dans ce film, des portrait de tous les gens qui étaient proche de nous à l’époque dans le Montfaucon. Des gens d’ici, de Bruxelles, de Paris. On les vois tous, ce sont de petits portraits où ils disent une phrase: Light Motive qui vient tout le temps dans le film et que chacun d’eux répètent dans sa langue ou dans sa manière. C’est aussi la première fois qu’on a demandé à Jacques Lederlin, qui est mon compagnon depuis l’époque pratiquement, de la musique pour cette bande. Tout le montage a été fait sur la musique de Jacques. Tous les ingrédients étaient là et après ça a continué pendant tous les années ‘80. On a tourné l’été ‘78, après très vite, septembre/ octobre, on a commencé à monter. Le montage a été long parce que c’était beaucoup de petits plans, extrêmement construit. Ca n’a jamais été distribuer/diffuser d’aucune façon. Il y a eu une grande présentation au Pompidou, sur invitation, avec tout le monde qui était là, les présidents, conservateurs, etc. Ca a été très bien reçu. Ils étaient très content du travail, mais il n’y avait aucune distribution possible pour un objet comme ça. A l’époque, il n’y avait pas encore les créneaux de télévision spécialisé dans l’art. Donc c’était un acte gratuit de plus. Mais c’est un très beau souvenir.
Et c’était présenter comment au Centre Pompidou? Des écrans? Projecteurs?
Il n’y avait pas de projecteurs à l’époque. C’était comme si c’était la télévision. Je ne me souviens pas comment c’était présenter, mais eux doivent le savoir. En tout cas c’était vraiment quelque chose d’important pour nous tous. A la suite de ça, il s’est passé pas mal de choses. On s’est mis a faire de la radio pour la France. On a fait des émissions. C’était le même producteur à France Culture qui avait demandé cette vidéo. C’était une emission qui s’appellait les ateliers de création radiophonique, qui était une emission fleuve qui durait 2h10, le dimanche soir pas tard en heure de prime-time. Une très belle émission toutes les semaines, qui a duré très longtemps, peut-être 20 ans. Les dernières ont été dans les années fin ‘80, quelques choses comme ça. C’était des emissions avec tous les moyens de la superradio. Il y avait de grands ingénieurs du son, les magnifiques studios de la radio circulaire et tous les rafinements de France Culture avaient carte blanche. On arrivait là-bas avec un projet et si il était accepté, on faisait ce qu’on voulait, on demandait les moyens, des instruments de musiques, des déplacements pour faire des sons particuliers. On a fait cinq émissions, avant le plein du vide. On a dû commencé en ‘75-76 et comme on connaissait ces gens, ils nous ont commandé le film. Puis on a continué ensuite à faire d’autres émissions de radio. La dernière était en ‘89, c’était Ideale audience. C’était la fin de notre travail en vidéo. L’émission de radio a servie à faire la bande son d’une vidéo. J’ai fait ma dernière oeuvre vidéo avec mes amis. On a arrêté complètement, sauf quelques films que j’ai fait avec des archives, mais du point de vue de notre travail professionnel, on a vraiment arrêté fin ‘80. Ces émissions de radio étaient intéressantes d’abord parce que ce sont des émissions splendides à faire. On pouvait mettre notre musicien à faire de véritables opéras, des oeuvres de 2h10, avec toute sa bande d’amis qui jouait pour lui. En plus, on a eu l’idée d’utiliser au moins deux oeuvres radiophoniques pour faire la bande son d’une vidéo. On a mis l’image sur le son qu’on avait créé avant à la radio. Donc ça donnait des moyens de travail formidable. Il y avait aussi un peu d’argent pour vivre. Tout ça c’était toujours un peu la même équipe, plus focaliser sur la musique d’amis, un peu plus sur la France, parce que ça se passait là. On avait presque une espèce d’autre antenne, une succursale. A ce moment là, ça se passait chez mon frère, un squat d’amis, un lieu gratuit qu’on avait mis à sa disposition, comme un grand atelier où il hébergeait beaucoup de gens. Il a reprodruit un peu ce qu’on avait fait à Bruxelles et Paris. C’est avec mon frère, Bruno Stevens, d’origine belge, après le plein du vide début ‘80, qu’on commençait beaucoup de vidéo, de façon intensive, avec un peu d’émissions radiophoniques intercalé, mais c’était vraiment vidéo exclusivement pour nous. Le cinéma argentique était oublié, on était passionné par la vidéo.
Pour expliquer comment on a pris le problème de l’histoire de la vidéo: Le plein du vide c’était purement un objet d’art. On cherchait quoi faire de très beau avec ce médium, mais ensuite on s’est mis à s’intéresser à exprimer, à critiquer ou à étudier tout simplement le discours de la télévision et tout ce qui concerne la télévision à travers une vision autre décalée. Vraiment une espèce d’étude de la rhétorique/ du discours de la télévision. On s’est dit on va faire de la vidéo, c’est le médium qui fait la télévision. La télévision était à l’époque en train de monter en puissance, avec l’arrivée de la couleur. Il s’est passé beaucoup de choses sur la télévision qui nous ont beaucoup interessé. On s’est dit, on va travailler avec cette espèce de grande puissance, que personne analyse, que tout le monde absorbe et avale. Donc Enrique Ahriman, Jacques Lederlin et puis Michel Bonnemaison, on s’est mis à penser ‘qu’est-ce que c’est?’. Quand on nous commandait des vidéos comme ma vidéo suivante que j’ai faite Grimoire Magnétique, on pensait tout de suite quel mis-en-page on peut faire qui renvoi à des questions de télévision et des modes d’expression, purement télévisuel. Notre petite vidéo ce nourrissait de la télévision et on faisait un espèce de décriptage. Grimoire Magnétique, il y a toutes sortes de couches de texte, de musique et d’image et le personnage qui parle avec les gestes des muets, c’était le traducteur de la rtbf en ‘82 quand on a voulu faire ce film. Puis le cadrage, les sous-titre, l’écriture, les commentaires à l’image, les images qui défilent derrière le personnage, tout ça est inspiré de lay-out purement télévisuel. Evidemment, parlant de tout à fait autre chose, mais c’était comme ça qu’on a commencé à faire de la vidéo. C’était complètement démarqué de la télé. La télévision qu’on ne regardait pas tellement d’ailleur. Mais elle s’est mise à plus nous intéresser quand on s’est dit qu’il fallait traîter de son discours et en faire quelque chose. Après on a fait Le chant du satellite, c’était aussi une commande, mais nous avions inventer le sujet. C’est-à-dire, comme Grimoire magnétique a été primé à Charleroi, dans un concours - on a eu le deuxième prix du Palais des Beaux-Arts de Charleroi - à la suite de ça, comme on avait ce film avec la rtbf, quand on est arrivé avec un nouveau projet, ils ont tout de suite dit oui. On avait Jean-Paul Tréfois.
Aussi Robert Stéphane, qui était vidéographe? C’était lié à la vidéographie?
Oui, c’était à cette époque là, exactement. Trèfois était fou de la musique de Grimoire magnétique. Il était là quand on a enregistré la chanteuse sur la musique de Jacques. C’était très grand de leur part. C’était des choses passionnante à faire. Le chant du satellite a donc été la suite de ça, avec un sujet à nous qui n’était pas à la télévision directement, mais qui était plutôt les échanges en Europe, l’Europe des antennes et les échanges d’un centre qu’on avait inventé en s’inspirant du grand centre qui répandait les programmes dans toute l’Europe. On s’était inspiré de ce centre pour inventer un centre complètement délirant avec des termes, des appellations, des textes et règlements un peu Kafka, un peu fou. Et puis toujours la musique très présente, avec la chanteuse qui était la même que celle de Grimoire, qui joue un rôle d’une hôtesse d’opérette, qui chantait des petits couplets sur la télé. C’était très différent du point de vue image et contenu de Grimoire, mais il y avait une suite logique. On a continué comme ça. En Belgique avec Televessel, dont le son avait d’abord été fait à la radio, don le son à d’abord été fait à la radio en France.
D’abord en France?
Oui, c’est pour ça que ça dure 2h10, on a gardé toute la bande son et dessus on a monté des images. Alors on a beaucoup aimé travailler en magnétoscopant des images de la télé. On n’était pas les premiers à le faire, mais on a beaucoup aimé ça. Par exemple, Televessel, l’image est entièrement piraté à la télé. D’ailleurs, c’est pour ça que l’image est un peu rough, pas très belle. A l’époque, en ‘85, la télé n’était pas forcément très bonne qualité. Le magnétoscopage sur cassette, tout ça c’était important pour nous. J’ai toujours pensé que Televessel était une chose très importante pour nous, ça a pris beaucoup de temps, mais à la fin du compte, c’était une maquette. C’était juste la maquette à reprendre enièrement avec les moyens d’aujourd’hui, mais bon ça fait des expériences importantes.
Donc la aussi tout a été pris de la télévision: les textes, les titres, les sous-titres, que j’ai fait avec une vrai machine à sous-titrage qu’on avait loué. Ca a duré un an/ un an et demi à faire cette video de 2h. On a travaillé beaucoup chez Claude Haïm, image vidéo. Grimoire magnétique, c’est lui que nous a branché sur l’histoire du concours de Charleroi. Si on gagnait le concours de Charleroi, on avait des ressources et frais remboursés. C’était un producteur incroyable, il était très pauvre et courageux. Il a beaucoup aidé les gens autour de lui. Il nous a aidé follement. Il nous mettait toutes ses machines à disposition, parce qu’il n’était pas uniquement producteur, il était aussi en postproduction, car il avait aussi du matériel et un petit studio, surtout du matériel de postproduction qui au début était du numatique. C’était quelqu’un de très important pour nous à l’époque. C’est lui qui nous a invité à faire Grimoire, Jean-Paul Tréfois a aidé à faire Le chant du satellite et puis Televessel, c’est à nouveau avec Claude Haïm qu’on l’a fait. C’est chez lui, qu’on a magnétoscopé tous les rushes de la télé. Tout ce qui était texte sur l’image, avait été fait avec une machine qu’on avait loué pour faire la dernière partie du montage, toutes ces incrustations de texte. Tout ça sont des textes sur la télévision qui sont souvent assez critique, ironique, humoristique la plupart du temps. C’était une façon de parler de la télévision qui nous est venu comme ça, spontanément. On s’est beaucoup nourri aussi de Mashall McLuhan. Il y avait Vrilio aussi qui a été une personne importante, mais McLuhan c’est un peu notre père adoptif.
Les grandes oeuvres spécifiquement sur la télévision, c’était Télévessel et Ideale Audience en dernier. Idéale Audience, où la bande son était faite et diffusée à la radio. Les émissions évidemment étaient diffusées donc elles avaient un peu plus de retentissement que les videos. Toute notre époque vidéo ( à part Vidéo à la Chaine qui a été aussi des commandes de la télé, qui sont passées à la télévision et puis les oeuvres qui sont passées à la télévision grâce à Trèfois ou grâce à Garrel en France, dans des émissions spécifiques d’art vidéo) c’était la seule diffusion qu’on a eu, en France et en Belgique.
En Belgique, c’était uniquement la rtbf, plutôt côté francophone j’imagine?
On a diffusé des choses aussi sur Channel Four. Ca c’était plus tard, c’était Que Sera Sera, les chansons dansées. C’était une commande de Thierry Garrel. C’est pas qu’il nous demandait de faire six chansons et de danser sur des poèmes que j’avais écrit, non, c’était simplement qu’il nous disait que si on proposait un projet quil’intéressait, il le faisait et nous donnait les moyens de le faire. Tous les gens que j’ai cité, c’était des commandes de la sorte, des gens qui se proposaient à nous aider en moyen, en ressources, en honoraires et payement sur des projets qu’on leur soumaittait et qui leur plaisait. Il y eu un autre grand moment pour nous. Il y eu beaucoup de travail. C’était une commande de France 3 qui a été faite sur deux ans, ‘83 - ‘84. Ca a été fait vraiment pour la diffusion. C’était Vidéo à la Chaine. Il y a eu le premier Vidéo à la Chaine qui est une oeuvre de 30 minutes. Là on est plutôt dans la vidéo. On a fait une oeuvre avec tous les cinéastes français qui étaient autour de nous, qu’on connaissait et qu’on pouvait joindre. Toute une série de portrait de vidéaste et collègue à nous sur une musique de Jacques qui était très belle. C’était une commande qui a été agréé parce qu’on a présenté un petit monde encore très peu connu du vidéo-art français. Ca a été apprecié et ils nous ont proposé de faire une autre chose l’année suivante sous le même titre en court. C’était des émissions à diffuser tous les jours de trois minutes en prime-time avant le journal télévisé. Après avoir montré tous les vidéastes, on allait leur montrer les differents usages de la vidéo dans le monde de l’époque, en ‘84. Ca allait depuis les vidéos familles, des choses scientifique, de la surveillance, etc. Il y a 20 cilps de 3 minutes, tous sous une même règle de jeu avec les vidéastes qui avaient été invités l’année précédente à participer à l’autre vidéo avec simplement des portraits d’eux et des petites scenettes. L’année suivante, pour faire ces clips, on est retourné les chercher, et on leur a proposé un espèce de jeu avec un projet: ils choisissaient leur sujet dans les usages de la vidéo et ce sujet était mis en page avec des morceaux d’images de télévision (il y a un livre qui explique tout ça). Chacun d’eux proposait une présentation de son sujet: ils nous demandaient de filmé tel chose ou tel chose ou ils les filmaient eux-même. Il choisissait des formes de présentation de ces images, fonction d’un montage comme un méchano, avec la télévision en bandeau. Ce qu’on avait inventé, c’était que c’était un jeu avec les gens. On voulait les intègrer dans une télévision, comme une télévision en marche dans laquelle on allait insérer une petite vidéo. Dans l’image, il y avait leur vidéo et puis soit verticaux, soit horizontaux, la télévision qui continuait à tourner. Tout ça était complètement fabriqué bien sûr. Aujourd’hui tout ça ce fait facilement en numérique, mais à l’époque c’était un peu plus compliqué. Pour se mettre d’accord sur le montage qu’ils voulaient faire, on avait inventé des mechanos, des modules sous formes de petits rectangles qui representait l’écran de télévision et dans lequel on avait toutes les manières de placer la télé par rapport à l’image du vidéaste. C’était un jeu qui durait exactement 3 minutes. C’était une collaboration étroite avec des gens qu’on invitait à paraitre dans une oeuvre qui était à nous. Nous étions non seulement les producteurs de l’émission, mais en plus on intégrait ces gens comme la télévision dans un dispositif qu’on avait inventé et qu’on dirigeait. C’était très intéréssant. La bande sonore était intéressante, parce qu’il y avait un garçon et une fille qui alternaient selon les clips et qui faisaient une sorte de rap sur des textes que j’avais fait et la musique de Jacques qui était le support de tout l’édifice.
Toutes ces oeuvres sont très organisées, précices, calibrées. C’est assez curieux. Tout à fait le contraire de choses ouvertes, improvisées. Avec les films on était plus libre, plus ouvert, bien que dès que tu commences à monter sur de la musique, il y a tout de suite une rigidité, un ritme. Dans les films on se dirigeait déjà un peu vers ça, mais avec la vidéo c’est devenu la folie de programation. C’était assez étonant, mais ça tenait à nos personnalités et ça nous plaisait. C’est aussi la télévision dans son essence, elle a cette espèce de rigidité de programme et de durée. Tout ça était assez cohérent et ça fonctionnait. Ca c’était le second Vidéo à la chaine. Il y en avait deux qui ont été fait à un an d’interval en ‘83 et en ‘84, entièrement en France avec un autre producteur important pour nous, Pierre Olivier Bardet. Il a appelé sa société de production Idéale Audience, du nom de ma vidéo. On a travaillé avec lui avant ça, à ces début. C’est vidéos là, on les a faites à une époque où c’était pas une société qu’il avait, mais une association pour des productions de vidéos indépendantes. A ce moment là, ça s’appelait Vidéo Ciné Troc. Dans le début des années ‘80, on a fait aussi des choses assez intéréssantes: des videos sur des texte de Michel Bonnemaison qui étaient sur les médias, la télévision, le téléphone, etc. Il appelait ça des sermons. Ils sont tous joué par Enrique Ahriman qui est le personnage principal de la vidéo. Les textes sont de Michel, Jacques a fait la musique et moi j’ai collaboré à la réalisation, j’ai fait des voix et dit des textes. Les textes ont été repris dans différentes revues: Revue Trafic et une autre antérieur à Trafic, du centre de Montbéliard, une revue qui sortait tous les trois mois.
Idéale Audience est la dernière chose qu’on a fait qui était un paysage télévisuel en France. C’était l’idée de traiter la télévision française, à l’époque six chaînes de services publiques, sauf la cinq qui était Berlusconi à l’époque. C’est avec cette vidéo qu’on la mieux piraté les chaînes en les detournant d’une façon assez forte, comme par exemple prendre un jeu dans lequel il y a des invités qui y participent. Tu vois ses personnages sans parler, écoutant quelque chose. Idéale Audience c’était un espèce de programme avec beaucoup d’ingrédients différents. Des types de mise en nom, la publicité, les speakerine (= les femmes qui faisaient de la présentation de programmes) reviennent à chaque fois et beaucoup d’extrait d’emissions et d’auto-promotion. J’ai fait ça presque seule avec Jacques et Enrique. C’est humoristique et un peu méchant par moment. On a envie de rire de toute cette sauce un peu excessive. Ca c’était en ‘88 - ‘89. C’est donc la dernière vidéo sur la télévision faite.
Pour Vidéos à la Chaîne, vous avez quelques noms des cinéastes français que vous aviez invité?
Tous les noms sont dans la vidéo. Il y avait beaucoup de graphisme. Comme je suis graphiste, j’ai fait beaucoup de graphisme sur le papier et de caligraphie, donc j’ai toujours voulu le faire sur les vidéos. Tout le monde signe son nom. Ils sont tous nommé aussi dans les clips. La fin de chaques clips sont signé par eux. C’était tous des gens un peu connu, qui pour la majorité ont fini à la télévision. Ce sont des gens qui ont eu une vrai vie professionnelle.
Vous n’avez jamais travaillé, sauf en ‘73, avec un portapack?
Non, je n’ai jamais fait d’image, seulement copié. Je ne suis pas filmmaker. J’ai fait un peu de photograpghie, mais plutôt des objets et paysages et ensuite des photos de bateaux, mais j’ai pas du tout travaillé avec ces outils. Il y a certainement eu une époque où Carlos a travaillé avec ces outils, c’est sur.
Curators
Dagmar Dirkx, Niels Van Tomme
Research
Dagmar Dirkx, Sofie Ruysseveldt, Erien Withouck
Image research
Emma Vranken, Daniel De Decker
Text editing
Anthony Blampied, Dagmar Dirkx, Inge Coolsaet, Laurence Alary, Niels Van Tomme, Björn Gabriëls
Translations
Gorik de Henau (NL), Anne Lessebi (FR), Björn Gabriëls (EN)
Website Coordination
Emilie Legrand
Concept and graphic design
Studio Le Roy Cleeremans
Website
Waanz.in
Publisher
Niels Van Tomme / argos vzw
Archives
M HKA / ICC, New Reform Gallery / Roger D’Hondt, KMSKB, BOZAR, Art & Actualité, Jacques Charlier, Joëlle de La Casinière, Eric de Moffarts, Geneviève van Cauwenberge, argos, SONUMA
Bibliography
Johan Pas, Beeldenstorm in een spiegelzaal. Het ICC en de actuele kunst 1970—1990, Lannoo Campus, 2005, 300 p. Jean-Michel Botquin (dir.), Le jardin du paradoxe. Regards sur le cirque divers à Liège, Yellow Now / Côté Arts, 2018, 448 p.
Digitalisation
Onno Petersen, D/arch, CINEMATEK, VECTRACOM
argos thanks
Andrea Cinel, Anne-Marie Rona, ArtTouché, Chris Pype, Dominique Castronovo, Eric de Moffarts, Evi Bert, Guy Jungblut, Jean-Michel Botquin, Joanne Jaspart, Katarzyna Ruchel-Stockmans, Lastpost / Fabri3Q, Leen Bosch, Liesbeth Duvekot, Maryse Tastenhoye, Nadja Vilenne, Sandy Reynaerts, Veronique Cardon and all the artists, curators and researchers involved in the research project
This is argos
Amit Leblang, Anaïs Bonroy, Anne Leclercq, Dagmar Dirkx, Daria Szewczuk, Dušica Dražić, Eden Lamaizi, Femke De Valck, Francisco Correia, Guy Verbist, Hadrien Gerenton, Iakovos Sierifis, Indigo Deijmann, Inge Coolsaet, Isaac Moss, Jana Van Brussel, Jonas Beerts, Julie Van Houtte, Julia Wielgus, Katia Rossini, Katoucha Ngombe, Kevin Gallagher, Kianoosh Motallebi, Laurence Alary, Mar Badal, Maryam K Hedayat, Mélanie Musisi, Natalya Ivannikova, Niels Van Tomme, Rafael Pamplona, Riet Coosemans, Sander Moyson, Stijn Schiffeleers, Viktor Simonis, Yoko Theeuws
This is rile
Chloe Chignell, Sven Dehens
argos thanks the board
Johan Blomme, Katerina Gregos, Olivier Auvray, Suzanne Capiau, Tom Bonte
Partners
Cinema Nova, M HKA, CINEMATEK, VUB, KMSKB, Meemoo
Sponsors
WIth the support of Flanders State of the Art, Eidotech, VGC Vlaamse Gemeenschapscommissie, Vlaams Audiovisueel Fonds, Government of the Brussels Capital Region, Embassy of the Netherlands, Embassy of Slovenia, Instituto Italiano di Cultura